Le management par la peur est sanctionné par la Cour de cassation même en l’absence de harcèlement moral reconnu…
Cass. soc. 6-12-2017 n° 16-10.885 FS-D, Sté Soredis c/ C.
La Cour de cassation a reconnu, dans son arrêt du 6 décembre 2017, qu’un mode de management par la peur ayant confronté de nombreux salariés à une souffrance au travail peut caractériser un manquement de l’employeur à son obligation de prévention des risques professionnels, même en l’absence d’existence d’un harcèlement moral.
Dans cette affaire, l’employeur se défendait de toute responsabilité dans la vague de démissions notamment de ses salariés les plus anciens, étant par ailleurs établi au travers de plusieurs procès-verbaux d’audition et d’un rapport de l’inspection du travail, que de très nombreux salariés avaient été confrontés à des situations de souffrance au travail et à une grave dégradation de leurs conditions de travail induites par un mode de management par la peur.
L’argument de l’employeur était fondé sur le fait que les juges au pénal avaient écarté l’absence d’existence de harcèlement moral sur la salariée puisqu’elle n’avait pas personnellement été visée par les méthodes managériales mises en cause.
La Cour de cassation rejette cet argument et rappelle que le harcèlement moral et l’obligation de prévention des risques professionnels prévue par l’article L 4121-1 du Code du travail sont 2 notions distinctes bien que proches.
Les méthodes de management peuvent en effet caractériser un harcèlement moral lorsqu’elles visent un individu, mais, dès lors qu’elles ont une dimension collective comme dans le cas d’espèce, la situation relève du manquement de l’employeur à son obligation de prévention des risques à l’égard de l’ensemble des salariés.
Focus sur les pratiques managériales sanctionnées en l’espèce
- Pas de remplacement pendant les arrêts maladie,
- Réparation et maintenance du matériel de la salariée inexistantes,
- Division des membres de l’équipe managée par la salariée par effet de manipulation du supérieur ayant pour effet de mettre en difficulté la salariée qui ne parvenait plus à faire travailler ses collaborateurs dans des conditions normales,
- Refus d’entretien du supérieur de sorte que la salariée n’avait aucune possibilité d’exposer ses difficultés,
- Mise en place d’actions anti commerciales par le supérieur ayant des répercussions graves sur la qualité de l’environnement de travail de la salariée qui devait gérer le mécontentement de la clientèle sans aucun moyen d’actions correctives (….).